« have a sit, have a beer. »
ϟ loan & judas

« T'es bien des States, toi ! Comment ça tu n'as jamais entendu parler de la London Pride ? Mais t'es vraiment une inculte ma petite ! »
Judas avait un sourire en coin affiché sur son visage. Il ne pouvait s'empêcher de taquiner Loan. Il savait bel et bien qu'elle avait un an de plus que lui, cependant il n'était pas capable de retenir ses piques. Après tout, il était bien évident que sa verve habituelle, qui ne se tarissait jamais en présence d'un américain, n'allait pas disparaître du jour au lendemain. Cependant il semblait bien qu'il parvenait à se contrôler en présence de Loan.
Qui l'eut cru ? A la base, lorsqu'elle avait tenté de sympathiser avec lui, le londonien avait réagit comme de coutume. Autrement dit, il l'avait envoyée paître bien gentiment. Et il ne s'était plus abaissé par la suite à lui jeter le moindre regard. Il était comme cela, rien ne lui paraissait aussi complexe que les relations humaines. Pas même amoureuses ou amicales, seulement humaines. La vérité était qu'il ne faisait confiance à personne. Le jeune homme en était tout bonnement incapable. Il avait toujours été forcé de se débrouiller seul. Il avait peu d'amis. A quoi bon ? Il était venu au monde et il le quitterait en solitaire.
Mais sans savoir pourquoi, sans savoir comment, ils s'étaient mis à parler. Judas ne se souvenait même plus pourquoi dans un premier temps il avait daigné lui adresser la parole, et par la suite l'écouter. Mais la jeune fille avait su faire mouche, car au fond, elle était adorable.
Cela aurait pu en rester là, cependant tout alla plus loin, toujours plus loin. Et ce sans la moindre ambigüité. Une seule femme obsédait les pensées du british, et ce n'était pas cette brunette de Loan.
Et ils avaient parlé, toujours plus, toujours mieux. Pour au final, se confier l'un à l'autre sans la moindre honte. Judas ne lui avait pas parlé de Jules, c'était le seul jardin qu'il gardait secret pour quiconque. Pourtant l'américaine s'était désormais entendu narrer tout le reste de sa vie, de sa naissance à aujourd'hui.
Certains aiment placer des étiquettes sur les gens. « Fumeur », « gentil garçon », « intello », « délinquant », « débile », « fils de » ... Et rapidement, on avait commencé à qualifier Jude et Loan de « meilleurs amis ».
A vrai dire, le garçon n'avait jamais considéré qui que ce soit comme « meilleur » quoi que ce soit. Il était un gosse sauvage, un indépendant. Il n'avait jamais ressenti la nécessité d'avoir une personne privilégiée à ses côtés. En réalité-ci, mais pas en amitié.
Et pourtant ils en étaient là, Loan et lui. Ils parcouraient les rues de Los Angeles, ville qu'il haïssait au plus au point, car elle représentait cet illusoire American Dream puant le mensonge à plein nez. Un mois auparavant, il n'y aurait pas cru. Il n'aurait pas seulement conjecturé mettre le moindre orteil sur le territoire de Yankees … Cependant Jude était bien à terre, en zone ennemie. N'importe qui l'ayant un jour croisé dans sa vie se serait foutu de lui et de ses grands discours contre l'américanisation. Mais s'il était ici, avec Loan, c'était à la recherche de ses racines. Ses racines représentées par une simple boisson: une bière. Et pas n'importe laquelle: une London Pride. LA bière anglaise. L'unique.
Le british n'avait pourtant jamais apprécié l'alcool. Sans aucun doute à cause du modèle fraternel qu'il avait du contempler malgré lui. Pourtant, la seule chose de laquelle il avait envie depuis deux jours était le goût ambré de cette fameuse bière. Et puis, avouons-le ! Qui oserait qualifier cette boisson d'alcool ? Un coup aux toilettes et c'était fini.
Pour revenir à notre situation, Jude venait de découvrir que la jeune femme qui avait accepté de l'accompagner en ces lieux n'avait jamais entendu parler du but de sa quête. Certes, Loan avait bu de la bière, mais jamais de la London. Et en trouver à L.A. était loin d'être chose aisée.
Tous les bars dans lesquels ils avaient tenté de commander le breuvage si désiré n'en avaient pas entendu parlé non plus. Mais la bonne humeur de Judas ne l'abandonnait pas pour autant. Il était uniquement heureux d'être là, avec une personne avec qui il s'entendait si bien. La brunette n'avait pas eu la vie facile elle non plus, et c'était sans doute pour cela qu'il l'avait laissé s'approcher de lui autant que cela. Ils avaient des points communs au final.
« Un pub irlandais ! On va essayer là ! » s'exclama le jeune homme, toujours aussi guilleret.
Il lui sembla que la demoiselle soupirait à ses côtés. Elle en avait sans doute marre depuis le temps. Mais Jude fit mine de n'avoir rien entendu, car au fond, il n'était pas certain d'avoir entendu quoi que ce soit, trop absorbé qu'il l'était par sa recherche de son St Graal.
Et là, il le vit. Le logo sur la porte. Celui qu'il cherchait depuis sa descente du bateau. London Pride.
Il se fit tout à coup très cérémonieux, son demi-sourire toujours sur ses lèvres:
« Loan, assieds-toi, prends un bière, je vais t'apprendre la vie ! »